Fissures dans le Dôme : le mirage sécuritaire d’Israël
L'Iron Dôme d'Israel est davantage une propagande d'invulnérabilité plutôt qu'une réelle protection face à une vraie attaque massive de missiles et d'obus.
Les principaux points-clés :
Le système de défense israélien "Dôme de Fer" présente des failles importantes, remettant en question son efficacité réelle.
Des experts contestent les taux d'interception élevés annoncés par Israël, estimant qu'ils seraient bien plus faibles en réalité.
Des dysfonctionnements techniques et des dommages collatéraux ont été observés lors de l'utilisation du système.
Des inquiétudes sanitaires émergent concernant les risques de cancer pour les soldats opérant à proximité des radars du Dôme de Fer.
Face à ces lacunes, Israël développe de nouvelles technologies comme l'Iron Beam (laser) et le Scorpius G (guerre électronique), encore non éprouvées au combat.
Ces systèmes de défense high-tech visent à maintenir une image d'invulnérabilité d'Israël, mais révèlent aussi ses vulnérabilités croissantes.
La stratégie de défense israélienne semble se concentrer sur des solutions technologiques plutôt que sur les causes profondes du conflit.
Par Anis Raiss sur The Cradle
Le Dôme de Fer, présenté comme le bouclier de défense le plus efficace d’Israël, a été conçu pour projeter une image de sécurité et de supériorité technologique. Présenté comme un système de défense aérienne mobile de pointe, il était destiné à symboliser une barrière impénétrable protégeant l’État d’occupation des menaces extérieures.
Cependant, la réalité révèle une image différente : tout comme un enfant en costume de chevalier, impressionnant contre les épées en plastique mais totalement sans défense contre les armes réelles, le Dôme de Fer excelle principalement contre les armes relativement rudimentaires de la résistance palestinienne à Gaza.
L’image soigneusement conçue par Israël de son arme défensive la plus prisée fait partie d’un effort de marque plus large, ancré dans les techniques mises au point par Edward Bernays. L’État d’occupation s’est positionné comme une société cosmopolite, progressiste et démocratique, en contraste frappant avec les États voisins d’Asie occidentale, qu’il décrit comme violents et répressifs.
Le Dôme de Fer n’est pas seulement un système de défense mais aussi une construction psychologique conçue pour renforcer l’image d’une entité invulnérable sous la menace constante de voisins moins éclairés.
Un bouclier en ruine au nord
Malgré sa réputation, les performances de l’Iron Dome ont souvent été insuffisantes. De nombreuses vidéos ont fait surface montrant des dysfonctionnements, les missiles Tamir effectuant des manœuvres erratiques, explosant à proximité de zones civiles ou étant déclenchés par de fausses alarmes et causant des dommages aux infrastructures.
Ces échecs contrastent fortement avec les affirmations d’Israël d’un taux d’interception de 90 à 99 pour cent. Le professeur émérite Theodore Postal du Massachusetts Institute of Technology (MIT) propose une évaluation très différente. "Je dirais que le taux d'interception est au mieux de 4 ou 5 pour cent", a déclaré Postal dans une interview accordée au Boston Globe en octobre dernier.
Dans une étude de 2018 publiée dans le Journal of Global Security Studies, Michael Armstrong remet également en question le taux d’interception annoncé de "90 à 99 %" du Dôme de Fer. Pour commencer, il précise que "le taux d’interception est le pourcentage de roquettes détruites avant qu’elles n’atteignent les zones défendues ; il ignore les tirs de roquettes sur les zones non défendues”.
En d’autres termes, le système de défense ne cible, dès le départ, qu’une petite partie des roquettes tirées. Par exemple, les responsables israéliens ont affirmé que sur environ 1 000 projectiles tirés sur Israël par le Hamas lors de l’Opération Pilier de Défense de novembre 2012, Iron Dome a identifié les deux tiers comme "ne constituant pas une menace" et n’a intercepté que 90 % des 300 roquettes restantes. Armstrong souligne d’autres failles dans les calculs des partisans du Dôme de Fer :
L'analyse empirique suggère que les batteries Iron Dome ont intercepté moins de 32 pour cent de toutes les roquettes dangereuses pendant le Pilier de Défense, mais entre 59 et 75 pour cent pendant la Bordure Protectrice… Les calculs suggèrent en outre que le nombre de roquettes frappant des zones peuplées pendant le Pilier de Défense pourrait avoir été discret. En revanche, le nombre de menaces pesant sur les zones peuplées a peut-être été surestimé. Cela implique que le taux d’interception effectif d’Iron Dome pourrait avoir été nettement inférieur à celui signalé.
La situation est particulièrement désastreuse dans les territoires occupés du nord, où la ville de Kiryat Shmona, une colonie autrefois considérée comme protégée par le Dôme de fer, a vu sa population fuir face aux menaces croissantes.
Des milliers d’habitants ont abandonné leurs maisons, révélant ainsi les vulnérabilités que le Dôme de Fer était censé éliminer. À mesure que le Hezbollah étend ses règles d’engagement, le nombre de personnes déplacées va probablement augmenter, révélant encore davantage les insuffisances du système.
Alors qu’Israël s’efforce désespérément d’élargir ses options de défense, les nouvelles solutions s’avèrent tout aussi imparfaites, laissant la population vulnérable sous un système de défense qui n’est plus à la hauteur de son mythe. Le bouclier autrefois tant vanté s’effondre, et avec lui, le récit d’invincibilité soigneusement construit qui sous-tend depuis longtemps la stratégie de sécurité d’Israël.
La malédiction du cancer d’Iron Dome
Sous la surface du Dôme de fer d’Israël se cache une réalité plus sombre et plus inquiétante, une réalité qui menace non seulement le mythe de l’invincibilité mais aussi la vie de ceux qui exploitent ce bouclier. Une enquête menée en 2021 par Yediot Ahronoth a révélé de graves allégations sur les risques pour la santé des soldats d’occupation stationnés à proximité des puissants systèmes radar du Dôme de Fer.
Ces systèmes radar, surnommés "le broyeur" et "le grille-pain" par ceux qui travaillent à proximité, émettent une chaleur intense, transformant leur environnement en un creuset invisible. Plusieurs soldats ont livré des témoignages poignants sur des maladies potentiellement mortelles qu’ils croient liées à leur service.
Ran Mazur, qui a reçu un diagnostic de cancer des os un an après sa libération, a décrit la douleur atroce qui l'a rongé pendant son service, douleur que les médecins militaires ont trop facilement écartée.
Yonatan Chaimovich a comparé l'expérience de se tenir près du radar à son corps "bouillant de l'intérieur", une métaphore obsédante qui capture les dangers invisibles de leur exposition. Shir Tahar et Omer Hili Levy, qui ont tous deux développé un cancer après leur service, font partie de ceux qui pensent que leurs maladies sont inextricablement liées au temps passé à l'ombre du Dôme de Fer.
Malgré ces récits, l’armée israélienne a fermement nié toute augmentation inhabituelle des taux de cancer parmi le personnel du Dôme de Fer. Ils affirment que leurs protocoles approfondis de surveillance et de sécurité n’ont montré aucune différence significative en matière de morbidité entre les soldats du Dôme de Fer et ceux des autres unités militaires.
Mais les chiffres racontent une autre histoire : en 2011, sur 240 soldats qui se sont enrôlés dans trois cycles de formation pour le Dôme de Fer, au moins six ont développé un cancer pendant ou peu après leur service, une statistique qui soulève des questions sur le véritable coût de fonctionnement de ce système de défense.
Depuis le 7 octobre, aucune nouvelle enquête n’a permis de découvrir combien de membres des forces d’occupation israéliennes ont été victimes de la menace silencieuse des tumeurs au cours de cette dernière vague de conflit.
Illusions de haute technologie
Si le Dôme de Fer n’était pas truffé de défauts, les stratèges militaires israéliens ne se précipiteraient pas pour explorer des alternatives afin de maintenir l’illusion d’invulnérabilité de l’État. Les barrages Katyusha du Hezbollah, bien qu’apparemment primitifs, ont été déployés tactiquement pour submerger le Dôme de Fer et localiser ses emplacements, obligeant Israël à reconsidérer sa stratégie de défense.
Entre en scène le "Magen Or" ou Iron Beam, un nom qui se traduit par "Bouclier de Lumière" en hébreu. Développé par Rafael Advanced Defense Systems, ce projet représente la dernière tentative de l’État d’occupation de garder une longueur d’avance sur l’Axe de la Résistance et révèle l’insécurité croissante d’Israël.
Contrairement à l’Iron Dome, qui s’appuie sur des missiles intercepteurs coûteux, à environ 50 000 dollars chacun, l’Iron Beam promet de neutraliser les menaces à l’aide d’un laser de grande puissance, un concept qui semble tout droit sorti de la science-fiction.
L'Iron Beam, cependant, est encore largement expérimental et n'a pas été testé en combat réel. Déployé sur le front de Gaza fin 2023, il doit encore faire ses preuves en tant que système de défense fiable dans le chaos de la guerre.
L’adoption par Israël de la technologie laser, telle que Magen Or, s’inscrit dans une tendance plus large dans l’industrie de la défense, motivée non seulement par l’innovation mais également par des programmes d’aide substantiels de la part des États-Unis. Ces fonds étrangers, acheminés via de puissants lobbies comme l’AIPAC et J Street, contribuent à donner à Israël l’image d’une puissance technologique.
Pourtant, cette image témoigne moins de l’ingéniosité nationale que du produit de vastes ressources financières souvent dépensées dans des projets coûteux qui pourraient ne pas résister à l’épreuve des conflits du monde réel.
Des risques à fort enjeu
La portée de l’Iron Beam est limitée à environ 10 kilomètres et faiblit en cas de conditions météorologiques défavorables, un talon d’Achille qui pourrait s’avérer désastreux dans un conflit à grande échelle. Le système nécessite de grandes quantités d’énergie, fournies par un grand générateur, pour produire les faisceaux laser nécessaires à son fonctionnement.
Ce défi logistique et la nécessité de maintenir une infrastructure sophistiquée font que l'Iron Beam semble voué à l'échec sous de réelles pressions de combat.
L’évolution de Tel Aviv vers des technologies avancées comme l'Iron Beam révèle un problème plus profond au sein de sa stratégie militaire. En se concentrant sur des défenses de haute technologie, Israël s’attaque aux symptômes plutôt qu’aux causes profondes de son conflit en cours. Le recours à une technologie non éprouvée comporte un risque d’échec catastrophique, en particulier lorsqu’il est combiné avec le récent virage d’Israël vers des stratégies plus risquées.
Le système de guerre électronique Scorpius G, une autre solution de haute technologie vantée par Israël, ajoute à la complexité. Développé par Israel Aerospace Industries (IAI), Scorpius G est conçu pour détecter, classer, localiser et brouiller les systèmes radar avancés.
Cependant, comme pour l’Iron Beam, les performances du Scorpius G sur le terrain restent à prouver, illustrant encore davantage la précarité de la posture de défense d’Israël, une posture qui pourrait finalement le rendre vulnérable dans sa quête précipitée pour maintenir un avantage stratégique.
Alors que l’Axe de la Résistance de la région poursuit ses opérations avec précision et efficacité et que les colons israéliens dans les territoires occupés sont confrontés à des évacuations massives, la pression sur ces nouveaux systèmes de défense est immense.
La question de savoir s’ils fourniront la protection promise ou s’effondreront sous le poids des attentes reste ouverte, une question qui pourrait avoir des conséquences désastreuses pour la sécurité et la stabilité d’Israël.